10 questions sur les tours du monde en compétition

1 – De quels tours du monde s’agit-il ?
Trois événements ont marqué la course au large entre novembre 2016 et janvier 2017. Le plus médiatisé est le Vendée Globe, dont la ligne de départ et d’arrivée est située aux Sables d’Olonne, et qui vient de connaître sa 8e édition. Il s’agit d’un tour du monde en solitaire, sans escale et sans assistance à bord de monocoques de 18,28 mètres.
Un autre monument de la course au large à la française est le record du tour du monde en solitaire, dont la ligne de départ et d’arrivée est située entre la Bretagne et l’Angleterre. Le skipper qui relève le défi choisit son voilier en toute liberté.
Autre record de légende, le trophée Jules Verne, qui se court en équipage et qui s’élance et s’achève aussi entre Ouessant et le cap Lizard. Ces trois événements ont notamment pour point commun de virer les trois caps mythiques des mers du sud : Bonne-Espérance (Afrique du Sud), Leeuwin (Australie) et Horn (Chili).
D’autres courses autour du monde existent par ailleurs, comme la Volvo Ocean Race, qui se court sur des monocoques, mais en équipage. L’ancienne Whitbread débutera le 22 octobre 2017 à Alicante et comprendra 10 escales (Lisbonne, Le Cap, Hong Kong, Guangzhou, Auckland, Itajai, Newport, Cardiff, Göteborg, La Hague).
N’oublions pas le Golden Globe, un tour du monde en solitaire et sans escale (lui aussi), dont le départ sera donné en 2018 depuis Falmouth (Angleterre). Cette course a pour particularité de faire courir les marins sur des bateaux de plaisance old school et avec les outils de navigation qui étaient utilisés lors de sa première – et jusqu’à présent seule – édition, en 1968-69. C’est de ce premier Golden Globe Challenge qu’est né toute l’histoire de la course au large telle que nous la vivons aujourd’hui.
2 – Qui fait ou a fait le tour du monde en mode course ou record cet hiver ?
Vendée Globe : 29 skippers solitaires étaient au départ de cette huitième édition, représentant 10 nationalités différentes, avec une majorité de Français. Aux grands noms de la voile venus combattre pour la victoire se mêlent également des marins amateurs venus vivre une aventure. Le départ a été donné le 6 novembre 2016. C’est Armel Le Cléac’h qui s’est imposé en croisant la ligne d’arrivée le 19 janvier 2017 après 74 jours, 3 heures, 35 minutes et 46 secondes de mer à bord de Banque Populaire VIII.
Record du tour du monde en solitaire : Thomas Coville, skipper du maxi-trimaran Sodebo Ultim’, s’est élancé de Brest le 6 novembre 2016, pour une cavalcade en solitaire de 49 jours, 3 heures, 7 minutes et 38 secondes. S’il a pris le départ le même jour que les skippers du Vendée Globe, ce n’est que parce que les conditions météorologiques étaient particulièrement favorables ce jour-là : il était libre de choisir son jour et son heure de départ.
Trophée Jules Verne : Jeudi 16 décembre, Francis Joyon a franchi la ligne de départ entre Ouessant et le cap Lizard avec ses cinq équipiers. Après 40 jours 23 heures 30 minutes et 30 secondes de course, il est désormais détenteur du Trophée Jules Verne, depuis jeudi 27 janvier 2017. L’ancienne marque de référence appartenait depuis 5 ans à la Banque de la Voile avec le temps de 45 jours, 13 heures, 42 minutes et 53 secondes établi par le Maxi Banque-Populaire V, mené par Loïck Peyron et ses équipiers, en janvier 2012.
3 – Quels bateaux ?
- Pour les 29 skippers du Vendée Globe, il s’agit de monocoques (une coque) de 18,28m de long – soit 60 pieds - qui répondent à des règles de dimensions, de construction et de sécurité. Cette jauge est défendue par la classe IMOCA régie par les skippers, les organisateurs de courses et les partenaires des bateaux.
- Thomas Coville a, lui, signé son record autour du monde sur un maxi-trimaran (trois coques) de 102 pieds (31 mètres). Il aurait pu faire sa tentative de record sur n’importe quel bateau, mais le fait est que les trimarans sont, au large, les bateaux les plus rapides.
- Francis Joyon et ses cinq équipiers sont également partis sur un maxi-trimaran, de 105 pieds (31,5 mètres). Ce bateau aux couleurs d’IDEC a déjà remporté le Trophée Jules Verne sous la bannière de Groupama en 2010, puis il a gagné la Route du Rhum 2014 sous le nom de Banque-Populaire VII avec Loïck Peyron à la barre, Armel Le Cléac’h s’étant blessé quelques semaines avant le départ.
4 – Au fait, ça veut dire quoi « en solitaire » ?
On parle de navigation en solitaire quand le skipper est… tout seul à bord. L’assistance est autre chose : les règles s’aménagent en fonction de l’événement. Le règlement du Vendée Globe interdit au skipper toute aide tactique depuis la terre. Il peut en revanche faire appel à ses équipes pour des conseils techniques (pour les éventuelles réparations) ou médicaux. Le règlement proscrit aussi, sous peine de disqualification, toute aide extérieure en mer.
Un skipper ou un équipage en mode record peuvent en revanche être assistés depuis la terre : les recordmen ont le droit de s’adjoindre les services d’un ou plusieurs navigateurs – routeurs, marins ou météorologues – qui, depuis la terre, vont les aider à faire les bons choix stratégiques. Pourquoi ? Parce qu’un trimaran est particulièrement volage et que le skipper doit… « skipper » en permanence.
5 – Quelle est la route imposée ?
Une règle est invariable : les trois événements se courent d’ouest en est. Ils obligent les skippers à laisser à bâbord (gauche) le cap de Bonne-Espérance – la pointe sud de l’Afrique du Sud -, le cap Leeuwin – le point le plus au sud-ouest de l’île continentale de l’Australie -, et le cap Horn, la pointe la plus au sud du continent sud-américain, situé au Chili.
La variable, c’est le positionnement de la ligne de départ et d’arrivée : les Sables d’Olonne sont l’avant-scène du Vendée Globe. Les records ont pour ligne de départ et d’arrivée une ligne virtuelle dessinée entre l’île d’Ouessant (France) et le cap Lizard, le point le plus septentrional du Royaume-Uni. Brest est très régulièrement ville hôte des tentatives de record.
6 - Pourquoi faire la route d’ouest en est ?
Parce que c’est dans ce sens que les vents sont les plus favorables. Le principe du tour du monde est de couper toutes les longitudes du globe avant de revenir au point de départ. Cette circumnavigation en bateau n’est possible qu’en descendant dans les mers du sud.
Une autre option serait envisageable via les canaux de Suez et de Panama, mais ça ne serait pas tout à fait la même histoire… ni le même temps. C’est en effet en descendant bas dans le sud qu’on atteint des latitudes où les parallèles sont plus courtes. Le tour de la terre, à l’équateur, mesure 40 075 kilomètres. Il ne fait « que » 23 038 km sur le 55e parallèle Sud, le point le plus bas autorisé lors de la 8e édition du Vendée Globe.
7 – Pourquoi les solitaires vont moins vite que les équipages ?
Deux raisons expliquent le différentiel de vitesse, toutes choses égales par ailleurs. Un solitaire barre réellement moins de 15% du temps. Il confie donc la route à son pilote automatique, pour se consacrer au réglage des voiles et à la gestion du bord (repas, sommeil, réparations, analyse de la météo). Organisé en quarts, un équipage se répartit toutes les tâches et barre en permanence. Et les marins dorment un peu plus, ils sont donc moins fatigués et plus performants.
8 – Pourquoi les multicoques vont plus vite que les monocoques ?
De manière générale et à taille égale, un multicoque ira forcément plus vite qu’un monocoque, parce qu’il n’est pas handicapé par la présence de la quille, qui est une masse immergée importante, de l’ordre de 3 tonnes sur un monocoque du Vendée Globe, à 4,5 m de profondeur. L’organisation de la gestion et de l’exploitation des forces latérales et verticales qui s’exercent sur un bateau est également favorable à un multicoque.
Enfin, évidemment, la dimension des voiles étant proportionnelle à la taille du bateau, plus un bateau est grand, plus il va vite. Le maxi-trimaran Sodebo Ultim’, qui a signé le nouveau record du tour du monde en solitaire en un peu plus de 49 jours, jouit donc d’un potentiel de vitesse largement supérieur au monocoque Banque Populaire VIII qui a remporté le Vendée Globe en 74 jours environ.
9 – Pourquoi les bateaux vont-ils toujours plus vite, année après année ?
Le temps de référence du Vendée Globe diminue édition après édition, et c’est à mettre au crédit des architectes navals et des bureaux d’études, de mieux en mieux armés pour aller chercher des performances supérieures. Force de « frappe informatique » et qualité des matériaux de construction se marient très bien à l’expérience acquise. Les architectes et chefs de projets de course au large estiment qu’une évolution normale des performances, Vendée Globe après Vendée Globe, c’est 5% de vitesse en plus.
Les records sont aussi soumis aux performances techniques, mais ils sont plus difficiles à faire tomber, la météo jouant un rôle crucial dans les performances. Le fait est que cet hiver 2016-2017 aura été particulièrement généreux avec les marins...
10 – Est-ce normal que les bateaux cassent ?
Grâce à la science, on sait aujourd’hui construire des bateaux robustes capables de supporter toutes les conditions, mais on sait aussi faire des bateaux ultra-rapides. Tout l’enjeu des architectes et des chantiers navals dévoués aux projets de course au large est de trouver l’exact compromis entre la fiabilité, qui requiert beaucoup de matière, et la performance, qui exige beaucoup de légèreté. Le vainqueur est celui qui aura trouvé le meilleur compromis… Et qui aura eu la chance de ne pas rencontrer d’OFNI, ces objets flottants non identifiés, qui flottent entre deux eaux et blessent les bateaux.
L’hiver de tous les records
Les records du tour du monde en solitaire et en équipage ont chuté, tout comme le temps de référence sur le Vendée Globe. Petit mémo:
- Tour du monde en solitaire (record) : Thomas Coville (maxi-trimaran Sodebo), établi le 25 décembre 2016 en 49 jours, 3 heures, 7 minutes et 38 secondes.
- Tour du monde en équipage (record) : Francis Joyon (maxi-trimaran IDEC), établi le 27 janvier 2017 en 40 jours 23 heures 30 minutes et 30 secondes.
- Vendée Globe (nouveau temps de référence) : Armel Le Cléac’h (Banque Populaire VIII) établi le 19 janvier 2017, en 74 jours, 3 heures, 35 minutes et 46 secondes.
News
Francis Joyon et ses équipiers (Bernard Stamm, Alex Pella, Clément Surtel, Gwénolé Gahinet et Sébastien Audigane) ont franchi la ligne d’arrivée du Trophée Jules Verne, ce jeudi matin, en un temps historique: 40 jours 23 heures 30 minutes et 30 secondes. Une veritable performance, quand on sait que ce mythique record (45 jours, 13 heures, 42 minutes et 53 secondes) était déténu depuis 2012 par Loïck Peyron et ses hommes, à bord du Maxi Banque Populaire V.
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Du village de départ à l'émotion de l'arrivée, revivez l'édition 2016-2017 du Vendée Globe remportée par Armel Le Cléac'h à bord du Mono Banque Populaire VIII.